• La démission surprise de Sébastien Lecornu a momentanément fait vaciller les actions françaises. Toutefois, la volonté affichée de l'ancien Premier ministre d'éviter une dissolution a rassuré les investisseurs.
• L'élection de Sanae Takaichi à la tête du PLD a entraîné une forte progression des actions japonaises et une baisse du yen, en raison de ses positions en faveur de politiques fiscales et monétaires accommodantes.
• L’Union européenne souhaite protéger son marché de l’acier en divisant par deux le quota d’importations et en relevant les droits de douane à 50 % pour les importations hors quotas, tandis qu’aux États-Unis, le shutdown persiste sans perspective claire de résolution.
En l’absence de données économiques aux États-Unis, et avant la saison de publication des résultats du troisième trimestre qui débutera la semaine prochaine avec les banques américaines, le marché s’est concentré sur les nouvelles politiques.
La semaine s’est ouverte sur le feuilleton français avec la démission lundi matin d’un gouvernement annoncé le dimanche soir. Cela a fait vaciller les actions françaises et entraîné les taux français à la hausse, lesquels se sont écartés un peu plus des autres taux gouvernementaux de la zone euro, notamment les taux allemands. Ce mouvement d’aversion au risque a cependant été de courte durée. Dès lundi après-midi, la situation se stabilisait et la volonté affichée du premier ministre démissionnaire Sébastien Lecornu de trouver un compromis pour éviter la dissolution, ou au moins repousser cette échéance, a rassuré les investisseurs.
Au Japon, l’élection du week-end a vu la victoire de Sanae Takaichi à la tête du parti PLD, qui devrait donc être la future première ministre. Les actions japonaises ont fortement progressé et le yen a baissé car elle est favorable à une politique fiscale expansionniste et une politique monétaire accommodante. Cela recule dans le temps une probable hausse de taux de la Banque du Japon. Cependant, en fin de semaine, l’autre parti de la coalition (Komeito) a remis en cause sa participation à un gouvernement, pesant ainsi sur les actifs japonais.
Aux États-Unis, la fin du « shutdown » reste incertaine. Les minutes du dernier FOMC ont été publiées. S’il y avait un consensus pour la baisse de taux, notamment en raison des données montrant une dégradation du marché de l’emploi, certains membres s’inquiètent cependant de l’évolution de l’inflation. Cela n’a pas remis en cause les attentes du marché de deux baisses de taux supplémentaires d’ici la fin de l’année. Côté géopolitique, M. Trump s’est concentré sur les négociations de paix entre Israël et le Hamas et un cessez-le-feu a été accepté des deux côtés.
Sur le front des taxes douanières, les annonces se succèdent. L’Union européenne souhaite protéger son marché de l’acier en divisant par deux le quota d’importations et en relevant les droits de douane à 50 % pour les importations hors quotas. La Chine a décidé d’imposer des taxes portuaires spéciales sur les navires américains à partir du 14 octobre. Cela fait suite à une décision similaire des États-Unis sur les navires chinois.
Cet environnement politique et géopolitique toujours instable permet à l’or de continuer sa marche en avant en dépassant le niveau de 4000$ l’once et au dollar de progresser en repassant sous les 1,16$/€. Cela nous amène à conserver une vue prudente sur les actifs risqués, notamment sur les actions américaines. Nous sommes plus positifs sur la duration, notamment sur les obligations des pays émergents, et gardons notre préférence pour les obligations d’entreprises les mieux notées.
ACTIONS EUROPÉENNES
La France a occupé le devant de la scène en Europe cette semaine. Sébastien Lecornu, fraîchement nommé à la tête du gouvernement, a remis sa démission à l’Élysée. Malgré cela, il a engagé une dernière phase de négociation et a pris la parole mercredi, affichant son optimisme quant à la possibilité de parvenir à un accord pour la formation d'un nouveau gouvernement, laissant ainsi entrevoir une échappatoire face au risque accru de dissolution de l’Assemblée nationale. Outre Atlantique, le shutdown reste de mise, mais n'exerce pas de pression additionnelle significative sur les taux souverains.
Le soulagement est ainsi notable sur les marchés financiers français avec un CAC 40 franchissant de nouveau la barre des 8000 points, grâce notamment aux valeurs du luxe (LVMH, Hermès, Kering) qui ont bénéficié de relèvements d’opinions de la part des brokers. Notons également le rebond de valeurs fortement pénalisées ces derniers jours, tels que Thales, Société Générale, BNP Paribas ou encore Orange.
Du côté d'ASML, le titre a été pénalisé à la suite d’une commission spéciale de la Chambre des représentants des États-Unis accusant la société néerlandaise de vendre des équipements à des entreprises chinoises détenues par l’État et liées à l’armée.
Enfin Stellantis a publié des estimations préliminaires de livraisons pour le troisième trimestre à +13 %, surpassant les attentes et confirmant des signes de reprise aux États-Unis.
ACTIONS AMÉRICAINES
Les marchés américains ont terminé en hausse sur la semaine : le S&P 500 progresse de +0,29 % (USD) et le Nasdaq 100 de +1,26 %, inscrivant de nouveaux records malgré la poursuite du shutdown fédéral. La dynamique s’appuie notamment sur l’anticipation d’un nouvel assouplissement monétaire. Le compte rendu du Federal Open Market Committee (FOMC) penche en faveur d’un nouvel abaissement des taux d’ici la fin de l’année, bien que le comité reste partagé sur le rythme à suivre. Sur le plan politique, le shutdown entre dans sa deuxième semaine, privant toujours le marché de statistiques officielles. En toile de fond, Washington poursuit le bras de fer commercial en proposant d’interdire aux compagnies chinoises de survoler la Russie pour les vols à destination et en provenance des États-Unis, et annonce des droits de douane de 25 % sur les camions moyens et lourds à partir du 1er novembre.
L’IA ainsi que les semi-conducteurs ont de nouveau occupé le devant de la scène. AMD (+41,43 %) s’est envolé après l’annonce d’un partenariat massif avec OpenAI – jusqu’à 6 GW de capacité de data centers autour de la nouvelle puce MI450. Un nouveau rapport de The Information est toutefois venu alimenter des discussions autour de la rentabilité de la monétisation de l’IA d’Oracle, tandis que l’application Sora lancée fin septembre par OpenAI soulève des questions autour du respect des droits d’auteur.
Dans la consommation et la mobilité, Tesla (+1,33 %) a présenté deux nouveaux modèles de véhicules plus abordables afin d’aller conquérir de nouvelles parts de marché, tandis qu’en parallèle l’Agence américaine de sécurité routière – NHTSA - a ouvert une enquête portant sur la sécurité de l’option de conduite autonome de Tesla. Delta Air Lines (+4 %) a relevé ses perspectives et United Airlines (+6,3 %) a suivi.
Dans l’industrie automobile, Ford (-9%) fait face à un risque d’approvisionnement après l’incident chez un fournisseur d’aluminium. Les financières restent au centre de l’attention avant l’ouverture de la saison des résultats du T3 (les résultats trimestriels de JPMorgan, Goldman Sachs, Citigroup, Wells Fargo sont notamment attendus). L’énergie, les constructeurs immobiliers et les biens de consommation de base ont sous-performé cette semaine. Enfin, du côté des matières premières, l’or a inscrit de nouveaux records au-delà de 4 000 $ l’once avant de se consolider vivement en fin de semaine du fait de prises de profits et d’une détente géopolitique ponctuelle.
MARCHÉS ÉMERGENTS
L'indice MSCI EM a progressé de 0,16 % cette semaine en USD, alors que les vacances dans plusieurs pays asiatiques ont réduit le nombre de jours d’ouverture des marchés. Taïwan et l'Inde ont enregistré des hausses de 1,58 % et 0,91 %. Le Brésil, le Mexique et la Chine ont reculé respectivement de 1,64 %, 1,49 % et 0,88 %.
En Chine, la masse monétaire M2 a progressé de 8,5 % en glissement annuel en septembre. Parallèlement, la Chine et les États-Unis cherchent à tirer parti des négociations commerciales avant un potentiel sommet de l'APEC, marqué par une nouvelle série de discussions sur les barrières commerciales et le contrôle des exportations. Dans l'ensemble, les chiffres de la consommation pendant la Golden Week ont été faibles, avec une augmentation de 1,6 % du nombre moyen quotidien de touristes par rapport à l'année précédente, mais une baisse de 0,6 % des dépenses. Les ventes au détail des principales entreprises ont augmenté de 2,7 % pendant cette période. BYD a confirmé qu'elle débutera la production dans son usine hongroise d'ici la fin de l'année 2025. Par ailleurs, Xiaomi a annoncé une augmentation de plus de 20 % des ventes de sa série Xiaomi 17, en glissement annuel.
À Taïwan, les exportations ont augmenté de 33,8 % en glissement annuel en septembre, ce qui est inférieur aux prévisions de 38,8 %. Les importations ont augmenté de 25,1 % en glissement annuel en septembre, ce qui est supérieur aux estimations de 22,5 %. Accton a annoncé un chiffre d'affaires trimestriel pour septembre supérieur de 26 % aux prévisions, avec une croissance de 142 % en glissement annuel, grâce à Amazon Trainium. Le chiffre d'affaires de TSMC au troisième trimestre a augmenté de 6 % en glissement trimestriel, contre une prévision médiane de +0,6 % sur le trimestre. TSMC a lancé avec succès la première série de plaquettes 12 pouces 2 nm en production d'essai. Les ventes de Hon Hai ont atteint un niveau record en septembre, avec une croissance de +15 % en glissement trimestriel au troisième trimestre.
En Corée, LG redouble d'efforts pour devenir le leader des infrastructures d'intelligence artificielle et a présenté sa solution intégrée One LG pour les centres de données IA. L'introduction en bourse de LG India, d'une valeur de 1,3 milliard de dollars, a été sursouscrite 54 fois. Les responsables d'OpenAI ont visité les installations de fabrication de semi-conducteurs de Samsung Electronics à la suite d'un accord de partenariat pour ses projets Stargate.
Au Vietnam, FTSE Russell reclassifie le pays en marché émergent secondaire.
En Inde, l'indice PMI des services corrigé des variations saisonnières a reculé à 60,9 en septembre, contre 62,9 en août. Le rythme de croissance de l'indice des nouvelles commandes à l'exportation a atteint son plus bas niveau en six mois, reflétant un affaiblissement de la demande internationale. La RBI a publié un projet de directives pour la révision des cadres de Bâle III relatifs au risque de crédit et aux pertes sur créances. Le ministère fédéral de la Santé a annoncé une révision des tarifs de près de 2 000 actes médicaux pris en charge par les services de santé du gouvernement central. Selon divers articles parus dans les médias, la Maison Blanche a suspendu son projet d'imposer des droits de douane sur les médicaments génériques. Les articles indiquent que l'administration américaine ne discute pas activement de l'imposition de droits de douane au titre de l'article 232 sur les médicaments génériques. Bajaj Finance a annoncé une croissance de 26 % de ses nouveaux prêts au deuxième trimestre, conformément aux prévisions. DMART a annoncé une croissance de 15 % de son chiffre d'affaires au deuxième trimestre, contre 20 % prévu. Titan a annoncé une croissance de 20 % en glissement annuel au deuxième trimestre, bien supérieure à l'estimation de 8 %. Eli Lilly a annoncé son intention d'investir plus d'un milliard de dollars en Inde au cours des prochaines années afin de développer de nouvelles capacités de fabrication sous contrat. Google s'apprête à investir 10 milliards de dollars pour créer un cluster de centres de données d'une capacité de 1 GW. TCS annonce 8 milliards de dollars de dépenses d'investissement dans la construction de centres de données.
Au Brésil, l'inflation du mois de septembre a augmenté de 5,17 % en glissement annuel, conformément aux prévisions. La production industrielle en août a reculé de 0,7 %, contre des prévisions de -1,3 %. L'indice PMI composite de septembre s'est établi à 46,0, contre 48,8 précédemment. Le ministre des Finances a réaffirmé que le gouvernement étudiait la possibilité d'adopter la gratuité des transports publics dans le pays. Le Congrès a bloqué un projet de loi visant à augmenter l'impôt sur les dividendes.
Au Mexique, l'IPC a augmenté de 3,76 % en septembre, conformément aux prévisions. Les investissements fixes bruts ont reculé de 6,6 % en glissement annuel en juillet, surpassant les attentes qui prévoyaient une baisse de 7,3 %. Grupo Mexico a présenté une offre ferme pour acquérir l'intégralité de Banamex, la filiale mexicaine de Citi. De son côté, OMA a annoncé une hausse de 9 % de son trafic en septembre par rapport à l'année précédente, supérieure à celle de ses concurrents et aux prévisions.
Au Pérou, la destitution de la présidente Dina Boluarte par la majorité du Congrès a surpris le marché.
En Argentine, les États-Unis ont finalisé un swap de devises de 20 milliards de dollars, achetant directement des pesos.
DETTES D’ENTREPRISES
La semaine a été marquée par un retour du scepticisme et de la prudence sur les marchés de crédit, notamment sur le segment du High Yield. Les minutes de la Fed publiées cette semaine ont révélé d'importantes divergences d'opinions parmi ses membres concernant le rythme de baisse des taux à adopter. Par ailleurs, les circonstances entourant la faillite soudaine de First Brands ont attiré l’attention sur certaines pratiques du monde du Private Credit.
Cette semaine, l'indice Crossover a gagné 10 points de base, atteignant 270 points de base. L'Investment Grade a enregistré une performance positive de +0,1 %, soutenue par un léger resserrement des taux. En revanche, le High Yield a reculé de -0,4 %, principalement en raison de la sous-performance des crédits à plus faible notation ou des secteurs cycliques (Chimie, Packaging).
Après le rush de septembre, peu d'émissions ont été enregistrées cette semaine. À noter toutefois l’émission d’un AT1 par la banque Grecque Piraeus Financial, offrant un coupon de 6,125 %.
Achevé de rédiger le 10/10/2025.
GLOSSAIRE
• Les titres « Investment Grade » désignent des titres obligataires émis par des entreprises dont le risque de défaut de paiement varie de très faible (remboursement presque certain) à modéré. Ils correspondent à une échelle de notation allant de AAA à BBB- (notation Standard&Poor’s).
• Les titres « High Yield » sont des obligations d’entreprises présentant un risque de défaut supérieur aux obligations Investment Grade (ou catégorie investissement) et offrant en contrepartie un coupon plus élevé.
• La dette senior bénéficie de garanties spécifiques. Son remboursement se fait prioritairement par rapport aux autres dettes, dites dettes subordonnées.
• La dette est dite subordonnée lorsque son remboursement dépend du remboursement initial des autres créanciers.
• Tier 2 / Tier 3 : segment de la dette subordonnée.
• La duration correspond à la durée de vie moyenne d’une obligation actualisée de tous les flux (intérêt et capital).
• Le spread désigne l’écart entre le taux de rentabilité actuariel d’une obligation et celui d’un emprunt sans risque de même maturité.
• Les valeurs dites «Value » sont considérées comme sous-évaluées.
• EBITDA est l'acronyme de Earnings before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization (en français : résultat d'exploitation avant intérêts, impôts et amortissement). Il mesure donc la création de richesse avant toute charge calculée. Il trouve son équivalent français en l'EBE (Excédent brut d'exploitation).
• CTA : stratégie quantiative qui investit principalement via des contrats à terme (futures) dans une vaste palette d’actifs financiers : Indices Actions, Taux Courts, Taux Longs, Devises, Matières Premières
• Le terme “Quantitative Easing” désigne un type de politique monétaire dit non conventionnel auquel peuvent avoir recours les banques centrales dans des circonstances économiques exceptionnelles.
• Un « stress test » est une techniques destinée à évaluer la résistance d'institutions financières.
• L'indice PMI, pour “Purchasing Manager's Index” (indice des directeurs des achats), est un indicateur permettant de connaître l'état économique d'un secteur.
• Coco (contingent convertible bonds) : format de dette subordonnée.
• Mortgage : une hypothèque est un instrument financier de garantie d'une dette.
• Les AT1 font partie d’une famille de titres de capital bancaire connus sous le nom de convertibles contingents ou «Cocos». Convertibles parce qu’elles peuvent être converties d’obligations en actions (ou dépréciées entièrement) et contingentes parce que cette conversion ne se produit que si certaines conditions sont remplies, comme la solidité du capital de la banque émettrice tombant en dessous d’un seuil de déclenchement prédéterminé.
• Les RT1 : souches obligataires perpétuelles avec un rappel anticipé possible à 10 ans. Le paiement des coupons est discrétionnaire et non cumulatif.
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