- La liquidité va repartir à la baisse après le relèvement du plafond de la dette américaine
- La poursuite de la désinflation ces prochains mois est porteuse d’espoir
- Nous privilégions les obligations au détriment des actions
Ce premier semestre a délivré son lot de surprises aux investisseurs. Les performances des marchés d’actions sont très au-dessus des attentes. La récession anticipée par une grande majorité ne s’est pas tellement matérialisée, tandis que l’économie américaine et sa sphère financière ont particulièrement bien résisté à une crise bancaire qui aurait pu être bien plus grave. Le thème de l’intelligence artificielle est monté en puissance en Bourse à un rythme exponentiel au point que la hausse du S&P 500 a été très concentrée sur les quelques valeurs en mesure de profiter de cet engouement. Le redémarrage de l’économie chinoise - que nous n’attendions pas très puissant - est chaotique et la performance des actions chinoises reste très volatile et nulle ou négative en tendance. En revanche, nous avons eu un début de confirmation de la désinflation aux Etats-Unis mais aussi en zone euro que nous anticipions, sous l’effet de la quasi disparition des tensions sur les chaînes de production et la forte baisse des prix des produits énergétiques et alimentaires.
LA DÉSINFLATION EST ENCORE FRAGILE MAIS GAGNE EN ASSISE
Ce mouvement est à un stade intermédiaire : fragile car encore très dépendante de la dynamique volatile des prix des matières premières, mais il gagne un peu d’assise avec le repli des anticipations d’inflation des ménages et des entreprises. Il n’est cependant pas acquis tant la dynamique salariale reste forte dans un contexte économique toujours assez porteur. Il est d’ailleurs frappant dans ce contexte de voir la Fed comme la BCE conduire les investisseurs à anticiper toujours de nouvelles hausses de taux. Les banques centrales, prises à défaut quant à leur crédibilité, doivent « enfoncer le clou » pour la reconstruire pleinement. Et l’histoire montre que relâcher trop tôt le biais restrictif d’une politique monétaire en pleine désinflation peut conduire la banque centrale à remonter ultérieurement les taux bien davantage.
Si Jerome Powell souhaite entrer dans la postérité pour le même fait d’armes que Paul Volcker, n’oublions pas que même ce dernier a dû s’y reprendre à plusieurs reprises pour vaincre l’inflation. Pour avoir cette assurance que l’inflation rentre bien dans le rang, les deux grandes banques centrales sont claires sur le fait qu’elles souhaitent voir le marché du travail stopper sa surchauffe. Des progressions salariales entre 4% et 5% comme on les observe de part et d’autre de l’Atlantique sont compatibles avec une inflation tendancielle autour de 3% et 4%, et non pas 2%. Il est probable que le ralentissement de l’inflation en cours entraîne prochainement celui des salaires mais pas dans l’ampleur nécessaire.
Après le laxisme budgétaire post-Covid/guerre en Ukraine, nous ne voyons nulle part le tournant de la rigueur, ce qui complique nécessairement le travail des banquiers centraux. Il est toutefois intéressant de voir que le phénomène de « greedflation » a pratiquement pris fin aux Etats-Unis et ralentit en Europe, plaidant pour une meilleure maîtrise de l’inflation.
La crise bancaire a eu l’effet paradoxal d’augmenter directement la liquidité, les banques commerciales américaines ayant sollicité les fenêtres spécifiques de la Fed en liquidités. Mais depuis le relèvement du plafond de la dette, le Trésor américain devra regarnir sa trésorerie auprès de la banque centrale pour plusieurs centaines de milliards de dollars. Un drain va donc se créer concernant les réserves des banques commerciales, pouvant générer quelques fragilités sur les actifs risqués.
LES VALORISATIONS À LA CROISÉE DES CHEMINS
Prenons le cas de l’investisseur américain face à trois grandes classes d’actifs dominant l’effet directionnel au niveau mondial - le monétaire, les obligations Investment Grade et le S&P 500. Elles offraient pratiquement le même rendement à la mi-juin, comme si les primes de risques avaient été mises entre parenthèses. Que choisir ? Schématiquement, pour surpondérer les actions dans le contexte actuel, au sein duquel la question de la récession reste latente, il faudrait être en mesure d’entrevoir une rupture avec un choc de croissance. On pourrait ainsi anticiper que la révolution de l’intelligence artificielle (dont les entreprises liées directement à la production de ce service sont déjà richement valorisées) sera en mesure de générer des gains de productivité pour des pans entiers de l’économie.
Jusqu’ici, depuis le paradoxe de Solow - « on voit des ordinateurs partout sauf dans les statistiques de productivité » -, les espoirs de productivité issus des nouvelles technologies ont globalement été frustrés. Selon l’économiste Robert Gordon, la révolution Internet a bien permis une remontée de la productivité américaine entre le milieu des années 1995 et 2005, mais simplement pendant une décennie. Cependant, l’absence de changement de rythme de la productivité dans les autres pays développés a laissé beaucoup de perplexité.
Il en sera peut-être différemment pour l’intelligence artificielle mais les précédents historiques invitent à un minimum de circonspection. Au-delà de cette question et à plus court terme, la volonté des banques centrales de refroidir l’économie, la prochaine réduction de la liquidité ainsi que le tassement de la « greedflation » ne sont pas des facteurs très propices. Ainsi, nous sous-pondérons les actions dans nos portefeuilles mais plutôt légèrement.
Concernant les obligations, le fait que les banques centrales pourraient resserrer davantage leur politique monétaire que ce que le marché anticipe actuellement ne constitue plus à ce stade un sujet d’inquiétude quant à l’effet duration. Les parties intermédiaires et plus longues de la courbe pourraient bénéficier de la détermination de la banque centrale à se débarrasser de l’inflation et donc à pouvoir baisser ultérieurement significativement les taux d’intérêts. Et la poursuite de la désinflation ces prochains mois ne peut être que porteuse d’espoir. A ce titre, nous surpondérons les obligations et les stratégies de portage sur l’Investment Grade et le High Yield de bonne qualité.
Si nous avons davantage confiance dans le déroulement de la désinflation que dans un hypothétique nouveau monde plus productif issu de l’intelligence artificielle, si nous privilégions les obligations au détriment des actions, c’est aussi une question de contexte. Les risques de récession et de resserrement excessif des banques centrales sur la liquidité perdurent, un environnement au sein duquel le durcissement de la réalité et du quotidien peut occulter la perspective issue des changements majeurs.
Retrouvez en vidéo nos perspectives et convictions avec Benjamin Melman, Global CIO Asset Management et Jacques-Aurélien Marcireau, Co-Responsable de la Gestion Actions.
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