Analyse de marché
05/04/2024
  • Les banques centrales recadrent le marché sur le rythme de baisse des taux à venir.
  • Il faut reconnaitre que les chiffres économiques américains ne montrent pas beaucoup de signes de faiblesse, même si l’inflation continue de baisser.
  • Dans ce contexte moins lisible, nous avons tactiquement réduit notre exposition aux actifs risqués, car les primes de risques nous semblent trop faibles en cas de déception sur le scénario de désinflation.

Les banques centrales recadrent le marché sur le rythme de baisse des taux à venir. Désormais, celui-ci n’anticipe plus que trois baisses d’ici la fin d’année vs six en janvier. Certains questionnent même ce scénario, ce qui soutient le dollar US et ramène les taux réels 10 ans américains de nouveau à 2%.

Il faut reconnaitre que les chiffres économiques américains ne montrent pas beaucoup de signes de faiblesse, même si l’inflation continue de baisser. Le marché de l’emploi reste particulièrement dynamique, avec 184 000 créations d’emplois en mars selon l’enquête ADP, des créations de nouveaux postes toujours soutenues selon l’enquête JOLT, mais également des salaires en hausse de 10% pour ceux qui changent d’emploi. On assiste ainsi à des déclarations divergentes entre membres de la FED quant au timing de la première baisse des taux à venir.

D’autre part, la hausse des taux se nourrit des craintes d’un dérapage des déficits publics avec les deux candidats à la présidentielle US qui ne montrent aucun appétit pour la discipline budgétaire via leur programme d’extension des baisses d’impôts et des risques de nouvelles taxes à l’importation pour Trump. Néanmoins, confiant dans le potentiel résiduel de désinflation, nous pensons toujours que le mouvement tendanciel est à la baisse des taux.

En Europe, l’inflation globale baisse un peu plus vite que prévu à 2,4%, mais l’inflation cœur reste élevée à 2,9% avec une résilience de la composante services. Au niveau de l’activité, le PMI européen poursuit son rebond en repassant dans le vert à 50,3, mais ceux de l’Allemagne et de la France restent encore en phase de contraction à respectivement 47,7 et 48,3.

En Asie, le rebond des PMI est beaucoup plus marqué, notamment en Chine, au Japon, et en Australie. En revanche Outre-Atlantique, les indices ISM US et PMI Canadiens marquent le pas en s’inscrivant en dessous des attentes.

Ce scénario de rebond de l’activité manufacturière globale, de tensions géopolitiques et de craintes d’une inflation plus dure à maitriser engendre une forte rotation cyclique au détriment des valeurs de croissance et une hausse du pétrole. On assiste également à un rattrapage de valorisation des valeurs bancaires post épisode Crédit Suisse, et à une hausse du secteur de l’énergie.

Dans ce contexte moins lisible, nous avons tactiquement réduit notre exposition aux actifs risqués, car les primes de risques nous semblent trop faibles en cas de déception sur le scénario de désinflation. Nous conservons notre préférence pour le rendement offert sur les marchés de taux et conservons une surexposition sur la duration.

Actions Européennes

Cette semaine aura été nettement orientée à la baisse, mettant fin à une longue période de hausse initiée en février. Si le ralentissement de l’inflation en zone euro (+2,4% vs +2,5% attendu, et +2,6% en février) aura provoqué un léger recul des taux souverains, notamment du 10 ans allemand, la bonne orientation des statistiques économiques n’incitant pas à une baisse des taux dans l’immédiat reste un obstacle dans l’appétit pour le risque et pèse sur les marchés actions. Le regain des tensions géopolitiques, au Moyen-Orient notamment, est également un élément défavorable. Par la même occasion le pétrole dépasse les 90 dollars le baril suite à la réunion de l’OPEP actant une accentuation des coupes dans la production, un niveau qui n’avait pas été atteint depuis 6 mois. 

D’un point de vue sectoriel, c’est tout naturellement que le secteur de l’énergie ressort en tête de liste, profitant de ce mouvement haussier sur le pétrole. Les banques ressortent également gagnantes du nouveau scénario de baisse des taux qui se dessine, avec moins de baisses, moins vite. A contrario, le secteur de l’immobilier se voit fortement sanctionné étant encore davantage tributaire de l’environnement de taux.

Le géant suisse UBS se porte particulièrement bien depuis le rachat de son concurrent l’année dernière et a annoncé cette semaine lancer son programme de rachat d’actions au titre de 2024. Le montant maximum sera de 2 milliards de dollars mais devrait se limiter à 1 milliard selon la banque. 

Solutions30, spécialisée dans les prestations techniques liées aux nouvelles technologies a dévoilé cette semaine des résultats annuels marqués par une nette amélioration de la rentabilité au S2. Des chiffres nettement supérieurs aux attentes qui confortent la trajectoire de redressement de la profitabilité. L’EBITDA ajusté 2023 ressort à 74,6 millions d’euros (+59,6%) vs 66 millions d’euros attendus, la marge d’EBITDA ajustée ressort quant à elle à 7,1% (+1,9pt) vs 6,3% attendus. Malgré ces chiffres très positifs, le titre est sanctionné en bourse, pénalisé par les élections prévues en Belgique qui devraient ralentir ponctuellement le déploiement de la fibre dans le pays, un marché majeur pour Solutions30.

A l’inverse, Voltalia se voit salué en bourse avec une hausse proche de 10pts suite à une publication très positive de ses résultats annuels. Le groupe publie un EBITDA 2023 supérieurs aux attentes de 241 millions d’euros vs 238 millions d’euros attendus. Les perspectives sont positives pour 2024, le management vise une augmentation de sa capacité, passant à 3,3GW en construction et exploitation (+16% vs 2023), dont 2,5GW en exploitation. 

Actions Américaines

Cette semaine fut relativement calme en termes de nouvelles spécifiques aux entreprises, cependant le flux de nouvelles géopolitiques négatives ont calmé les ardeurs du marché : après 26 semaines de hausse quasi-continue, un premier mouvement de correction commence à s’amorcer. Le S&P500 est en baisse de 2% sur la semaine : cette baisse s’est faite essentiellement jeudi soir suite à l’escalade des tensions au Moyen-Orient, . En conséquence, le Brent continue sa tendance haussière (+3,6%). De même pour l’or qui retrouve son statut de valeur refuge (+1,8%). 

Au niveau micro-économique, on constate une dégradation de la demande liée aux consommateurs. Ulta Beauty, le distributeur principal de produits de beauté aux US, effectue un profit warning en raison de la faiblesse des ventes depuis le mois de février. Les titres du secteur corrigent en conséquence : Coty perd 6%. Même Procter & Gamble, qui opère sur de la consommation de première nécessité, corrige de 4%. En revanche, les données sur l’emploi demeurent positives quant à la tenue de l’économie américaine : 184 000 emplois ont été créé en mars, contre 140 000 attendus (ADP). 

Concernant les semi-conducteurs, Intel corrige fortement en raison de pertes plus importantes que prévues sur leur activité Foundry (7 milliards de dollars).

Marchés émergents

L’indice MSCI EM a clôturé la semaine sur une hausse de 0,57%. La Chine et l’Inde ont progressé de 1,1%, tandis que le Brésil a cédé 0,74% et sous-performe les autres régions.
En Chine, l’indice PMI du secteur manufacturier est ressorti à 50,8 en mars, contre 49,1 en février. L’indice PMI non manufacturier a augmenté pour s’établir à 53,0 après 51,4 le mois dernier, un niveau une nouvelle fois supérieur aux attentes. L’indice PMI composite calculé par Caixin est ressorti à 52,7 contre 52,5 en février. La Commission nationale du développement et de la réforme (NDRC) a organisé une réunion avec six entreprises sur le renouvellement des équipements et le remplacement des biens de consommation. Le gouvernement a mis en place une nouvelle politique relative aux prêts automobiles pour stimuler la consommation. Sur le plan géopolitique, la secrétaire d’État Janet Yellen est arrivée à Guangzhou pour débuter son voyage en Chine. Les autorités chinoises ont supprimé les droits de douane antidumping et « antisubventions » sur le vin australien. Xiaomi a lancé une berline EV et a reçu plus de 100 000 commandes en 24 heures. Moutai a fait état de résultats supérieurs aux attentes au quatrième trimestre, grâce à une croissance soutenue du chiffre d’affaires et à une augmentation de la marge brute. 40% des entreprises de l’indice MSCI China ont publié leurs résultats pour le 4ème trimestre 2023 cette semaine. Au total, les chiffres d’affaires ont augmenté de 7% en glissement annuel, soit une nette amélioration après la baisse de 2% au 3ème trimestre 2023. Les bénéfices ont crû de 2% ce trimestre et, globalement, ont dépassé de 14% les anticipations du consensus, un niveau inédit depuis deux ans.
En Corée, les exportations ont augmenté de 3,1% en glissement annuel au mois de mars, avec un niveau record pour les exportations de semi-conducteurs (+35% en glissement annuel). Le président a rencontré le leader du mouvement de médecins en grève pour tenter de mettre fin aux débrayages. Samsung a annoncé des résultats opérationnels supérieurs aux prévisions pour le premier trimestre, grâce à l’augmentation des prix des puces mémoire. 

En Inde, l’indice PMI des services a encore augmenté, à 61,2 en mars après 60,3 en février. L’indice PMI manufacturier est resté solide à 59,1 et a propulsé l’indice PMI composite à 61,8, après 61,3 le mois précédent. La production d’électricité en mars (hors énergie renouvelable) a augmenté de 8% en glissement annuel et le ministère de l’énergie (MoP) estime que le pic de la demande atteindra 256-260 GW entre avril et juin 2024. La croissance du crédit (corrigée de la fusion de HDFC) a été soutenue, à 16,5% en glissement annuel en février 2024 (contre 16,2% en janvier). Dixon est en pourparlers pour prendre une participation majoritaire dans l’unité locale de fabrication de téléphones de la société chinoise Transsion Holdings. UltraTech a annoncé la construction de deux nouvelles usines de 5,2 millions de tonnes.

Au Brésil, la croissance totale du crédit s’est légèrement améliorée en mars, sous l’impulsion des banques privées. Hapvida a enregistré un bond de 104,8% de son bénéfice net ajusté pour le quatrième trimestre, grâce à une augmentation nette du nombre de patients et à l’amélioration du ratio de perte médicale.

Dettes d’entreprises

Crédit

Sur cette courte semaine, la tendance entamée la semaine dernière avec une hausse des taux sans risque s’est confirmée. En effet les données américaines ainsi que les discours de Jerome Powell tendent à souligner que rien ne presse de couper les taux dans l’immédiat. Le taux 10 ans US a repris 15bp de vendredi à jeudi soir à 4,32 re-testant le plus haut de l’année. Dans une moindre mesure le taux 10 ans allemand s’est également retendu à 2,35% soit 8bp plus haut.

Coté crédit, le marché était calme après quelques épisodes ciblés la semaine dernière sur certains émetteurs (SFR et Ardagh qui se sont d’ailleurs consolidés cette semaine). Les primes sont stables voire légèrement plus serrées sur le crossover à 296bp, et 110bp sur les bonnes notations. Le haut rendement s’inscrit toujours à 360bp après l’écartement de la semaine passée.

Le primaire reste cependant actif mais avec un volume néanmoins en retrait après trois mois de très fortes émissions. A noter la sortie de Vonovia, Valeo et également de Terna en dette hybride. Les carnets d’ordres continuent d’être bien souscrit avec notamment des coupons se resserrant face à l’afflux de la demande.

Du 28 mars au 04 avril, le segment Investment Grade gagne 0,08% et reste positif YTD à 0,47%. Le haut rendement gagne 0,12 % et s’inscrit à 1,73% depuis le début de l’année en raison de la très bonne tenue des primes sur le trimestre.

Convertibles

Après un mois de mars positif pour la classe d’actif, le marché des obligations convertibles commence avril sur une note plus prudente avant les premières publications de résultats d’entreprises. Pour le moment, le marché continue à se focaliser sur les données macroéconomiques et les commentaires des banques centrales. 

Dans ce contexte, le secteur financier continue de progresser à l’image de BNP Paribas qui gagne plus de 20% depuis son point bas mi-février. De même le secteur de l’énergie gagne encore 5% cette semaine avec un pétrole au-dessus des 85 dollars. L’action Total Energie avance de plus de 6% sur la semaine.

Après plus de 9 milliards de dollars de nouvelles émissions en mars, le marché primaire des obligations convertibles a marqué une pause cette semaine avec une seule petite émission de la part de la société suisse Medartis pour 115 MCHF à échéance 2031 avec un coupon de 3% et une prime de 27,5%. 

Achevé de rédiger le 05/04/2024

 

Glossaire

• Les titres « Investment Grade » désignent des titres obligataires émis par des entreprises dont le risque de défaut de paiement varie de très faible (remboursement presque certain) à modéré. Ils correspondent à une échelle de notation allant de AAA à BBB- (notation Standard&Poor’s). 
• Les titres « High Yield » sont des obligations d’entreprises présentant un risque de défaut supérieur aux obligations Investment Grade (ou catégorie investissement) et offrant en contrepartie un coupon plus élevé. 
• La dette senior bénéficie de garanties spécifiques. Son remboursement se fait prioritairement par rapport aux autres dettes, dites dettes subordonnées. 
• La dette est dite subordonnée lorsque son remboursement dépend du remboursement initial des autres créanciers.
• Tier 2 / Tier 3 : segment de la dette subordonnée.
• La duration correspond à la durée de vie moyenne d’une obligation actualisée de tous les flux (intérêt et capital).
• Le spread désigne l’écart entre le taux de rentabilité actuariel d’une obligation et celui d’un emprunt sans risque de même maturité.
• Les valeurs dites «Value » sont considérées comme sous-évaluées.
• Markit publie l'indice Main iTraxx (125 principales valeurs européennes), le HiVol (30 valeurs à haute volatilité), et le Xover (CrossOver, 40 valeurs liquides et spéculatives), ainsi que des indices pour l'Asie et le Pacifique. 
• EBITDA est l'acronyme de Earnings before Interest, Taxes, Depreciation, and Amortization (en français : résultat d'exploitation avant intérêts, impôts et amortissement).
Il mesure donc la création de richesse avant toute charge calculée. Il trouve son équivalent français en l'EBE (Excédent brut d'exploitation).
• Le terme “Quantitative Easing” désigne un type de politique monétaire dit non conventionnel auquel peuvent avoir recours les banques centrales dans des circonstances économiques exceptionnelles.
• Un « stress test » est une techniques destinée à évaluer la résistance d'institutions financières.
• L'indice PMI, pour “Purchasing Manager's Index” (indice des directeurs des achats), est un indicateur permettant de connaître l'état économique d'un secteur. 
• Coco (contingent convertible bonds) : format de dette subordonnée.
• Mortgage : une hypothèque est un instrument financier de garantie d'une dette. 
 

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